
Wishbone Ash
Bona Fide
Produit par
1- Almighty Blues / 2- Enigma / 3- Faith, Hope and Love / 4- Ancient Remedy / 5- Changing Tracks / 6- Shoulda, Woulda, Coulda / 7- Bona Fide / 8- Difference in Time / 9- Come Rain, Come Shine / 10- Peace


Après une décennie de productions très inégales durant les années 1980, Wishbone Ash avait timidement montré quelques signes d’activité au cours des 1990s, non sans user de quelques stratagèmes fallacieux. En 1998 en effet, Andy Powell fait paraître deux albums sous le nom du groupe pour donner davantage d’écho à ses expérimentations techno/dance aux côtés de Mike Bennett (Trance Visionary et Psychic Terrorism), un double désastre qui aurait pu signer la fin du combo. Les productions de la fin de la décennie et du début de la suivante témoignent d’un manque d’inspiration telle que les amateurs ne pouvaient savourer qu’une compilation de titres interprétés en version acoustique (Bare Bones, 1999) et un nouveau live (Live Dates 3, 2000). Rien d’honteux, mais rien de très inventif pour autant.
C’est pourtant ce même combo, à peine modifié par le départ du guitariste Mark Birch (ici remplacé par le Finlandais Ben Granfelt), qui décide d’apporter un nouveau souffle au groupe en 2002 avec la parution de Bona Fide, un nouvel opus dont la qualité est assez inattendue.
En effet, certains titres relèvent de l’exploit quand on sait à quel point même les plus grands groupes finissent par être abandonnés par la Muse. Ainsi, les notes fantomatiques et les mélodies d’"Enigma" renouent avec le meilleur de Number the Brave (1981) et "Come Rain Come Shine" évoque Wishbone Four (1973) – la flûte et surtout la transition heavy prog’ (à partir de 3 minutes) très surprenante en plus (un des grands, très grands moments de l’album). Nous noterons aussi les ambiances celtisantes et dansantes (et parfois hispanisantes) d’"Ancient Remedy", le riff lumineux du reggae "Shoulda Coulda Woulda", le camel-ien "Peace".
Bien sûr, la composition de Wishbone Ash commence à accuser le poids de l’âge, dans le sens où si les musiciens demeurent pleins d’entrain et remarquables sur scène, leur écriture s’engage de plus en plus dans la voie du classic rock conventionnel et parfois plan-plan. L’énergie et la virtuosité soliste d’"Almighty Blues" n’en font pas moins un blues-rock convenu, ce qui ne l‘empêchera pas de figurer régulièrement sur les setlists. La ballade bluesy "Faith Hope And Love" ne brille guère par son inventivité malgré de belles lignes de guitare (on pourrait en dire autant de "Difference In Time"), "Changing Tracks" est une sorte de "Money for Nothing" du pauvre croisé avec ZZ Top, "Bona Fide" est un instrumental décevant par son manque d’intérêt. Comme souvent avec les formations émérites devenues prudentes, le savoir-faire empêche la faute de goût, tout en ouvrant la porte à certaines facilités - sans aller jusqu'à parler de Bona Fade.
Solide et parfois glorieux, Bona Fide ne parvient pas pour autant à renouer avec leur âge d’or, avènement qui aurait été irréaliste d’espérer. Il ouvre par contre une nouvelle ère dans l’histoire du groupe, assez cohérente dans ses caractéristiques esthétiques et dont il demeure jusqu’alors le meilleur album : celle des vieux jours qui s’étendra tant qu’Andy Powell saura diriger le navire à bord duquel il est le seul capitaine.
À écouter : "Ancient Remedy", "Enigma", "Come Rain Come Shine"