
Lynyrd Skynyrd
God and Guns
Produit par Bob Marlette
1- Still Unbroken / 2- Simple Life / 3- Little Thing Called You / 4- Southern Ways / 5- Skynyrd Nation / 6- Unwrite That Song / 7- Floyd / 8- That Ain't My America / 9- Comin' Back For More / 10- God & Guns / 11- Storm / 12- Gifted Hands


Le rock sudiste a pu pâtir d’une mauvaise réputation sur le plan des valeurs qu’il porte, parfois de façon injustifiée même si le drapeau confédéré, présenté par ces groupes comme un simple symbole identitaire, conservait une ambiguïté indéniable dans les années 1970 – qui n’en est qu’exacerbée aujourd’hui. En outre, il est vrai que les représentants du genre tendirent parfois le bâton pour se faire battre, dont Lynyrd Skynyrd avec ce God and Guns au titre déjà suffisamment évocateur sur les principes défendus par le combo. L’éloge nostalgique de la simplicité du vieux Sud passe encore sur "Southern Ways", le titre reprenant des poncifs des Dixie-songs, mais on écoutera avec plus de circonspection "This Ain’t My America", car dans le genre "Tout part à vau-l’eau mes braves" on ne peut faire plus caricatural : les jeunes gens ne saluent plus les GI’s partant au front, les enfants ne peuvent plus prier dans les écoles, la chanson – très mièvre – est dédiée "to the women and men in their hands they hold a bible and a gun". Plus conservateur, tu meurs … ou tu t’appelles Ted Nugent. On ne prend pas trop de risque en corrélant ce tournant réactionnaire avec l'élection de Barrack Obama quelques mois plus tôt.
Heureusement, il reste la musique, et God and Guns aura parlé à suffisamment d’auditeurs pour être le seul réel succès de Lynyrd Skynyrd (si on en croit les charts) depuis la reformation. Le mérite à des compositions de bonne facture : "Still Unbroken", hard-rock sudiste à l’ambiance biker et au refrain (con)-fédérateur, "Skynyrd Nation", bourrin et groovy (veine Aerosmith), "Floyd", blues-rock racé des marécages (aux clins d’œil appuyés à ZZ Top), l’accrocheur "Storm", et surtout la ballade western "God and Guns" et sa deuxième partie électrique avec son solo digne des grands moments du genre.
Mais il semble que ce succès soit aussi issu de quelques choix discutables mais efficaces pour capter un maximum d’auditeurs, ce qui en fait paradoxalement un album plutôt moins inspiré que ses prédécesseurs mais indubitablement plus accrocheur pour le grand public. "Simple Life" est attendu et déjà entendu, voire légèrement calibré pour les radios locales, tout comme "Little Thing Called You" (encore une fois, le refrain est télécommandé), "This Ain’t My America", "Comin’ Back for More" (toujours un refrain too much) la terrible ballade "Unwrite this Song" … On est souvent plus proche de Nickelback que du Southern-rock pur et dur, c’est aguicheur, racoleur, donc forcément un peu décevant pour l’amateur du groupe.
Il aura fallu quelques compromissions pour parvenir à retrouver une popularité à la hauteur de son histoire, mais Lynyrd Skynyrd fait également un compromis avec son identité sudiste en maintenant fortement cette esthétique et en proposant des morceaux plus enracinés. Le paradoxe demeure : God and Guns fut le plus grand succès du XXIème siècle pour le groupe, tout en étant son album le plus blâmable.
A écouter : "Still Unbroken", "Floyd", "God and Guns"