
Babe Ruth
First Base
Produit par
1- Wells Fargo / 2- The Runaways / 3- King Kong / 4- Black Dog / 5- The Mexican / 6- Joker


On s’en doute peu de prime abord, mais en regardant la pochette du premier opus de Babe Ruth dans le détail, on peut y reconnaître la patte de Roger Dean qui, en effet, illustre cet album dans un registre un peu différent de ses tropismes fantastiques. Quoi qu’il en soi, l’année 1972 est bien celle qui assoie l’artiste comme figure incontournable de l’esthétique rock en général, progressive en particulier.
Le sportif cosmique qui sert de protagoniste à cette fresque renvoie directement au nom du groupe, Babe Ruth, emprunté à George Herman Ruth Junior puisqu’il s’agissait du surnom de cette star du baseball de la première moitié du XXème siècle. Pourtant, le guitariste Alan Shacklock qui dirige la formation (dont la première mouture portait son propre nom), de même que les autres membres – Dave Hewitt à la basse, Dick Powell à la batterie, Dave Punshon aux claviers et Janita Haan au chant – sont de bons citoyens britanniques, là où on attendrait des Américains, seuls à même d’apprécier ce sport saugrenu.
Difficilement classable stylistiquement puisqu’il emprunte à toutes les sous-catégories du rock (hard-rock et rock progressif, parfois pop), Babe Ruth se distingue par la présence d’une chanteuse talentueuse, Janita Haan, qui apporte une plus-value et une originalité dans un monde encore très masculin, malgré quelques figures remarquables à la même époque (Grace Slick, Sonja Kristina, Mariska Veres pour ne citer qu’elles). Hasard de l’histoire, il y a un titre qui s’intitule "The Runaways", tout comme le groupe entièrement féminin qui n’est pas encore formé à Los Angeles …
"The Runaways" justement, exemplifie bien la diversité dont fait preuve le groupe, ici avec une pop progressive et orchestrale (littéralement puisqu’un ensemble est invité) qui monte en puissance par palier. A l’inverse, "Wells Fargo", efficace sans être novateur, est un hard-rock à la limite du disco dans ses choix rythmiques ou d’introduire un saxophone, puis "King Kong" vient s’inviter, reprise saturée et plutôt propre d’une pièce jazz expérimentale issue du répertoire du grand Zappa (Uncle Meat, 1969). Pièce la plus longue, "Black Dog" est davantage un titre de classic-rock laissant les instruments développer leur propos que de rock progressif, et il s’avère vraiment plaisant et bien composé dans le genre. Enfin "Joker" s’avère être la pièce la plus oubliable de l’opus - un hard-rock chaloupé sans grande originalité.
Si le groupe a été oublié, il avait tout de même produit un petit succès qui avait marqué l’époque, "The Mexican", titre de rock-western imparable : style hispanisant en introduction, transition vers la partie plus rock ornée de magnifiques lignes de guitare – les mélodies sont excellentes, et reprise d’Ennio Morricone ("For a Few Dollars More") … Ce seul morceau justifie largement l’écoute de l’album, une invitation à galoper dans les terres d’un western non pas spaghetti mais "baked beans", afin de découvrir une formation qui hélas, ne parvint jamais à atteindre à nouveau ce niveau.
A écouter : "The Mexican", "Black Dog"