
Royal Blood
How Did We Get So Dark?
Produit par Royal Blood, Tom Dalgety, Jolyon Thomas
1- How Did We Get So Dark? / 2- Lights Out / 3- I Only Lie When I Love You / 4- She's Creeping / 5- Looks Like You Know / 6- Where Are You Now? / 7- Don't Tell / 8- Hook, Line & Sinker / 9- Hole In Your Heart / 10- Sleep


Il y a maintenant deux ans que j’ai découvert Royal Blood et leur premier album a immédiatement rejoint le top de mon classement personnel. En terme de ferveur, de rage, d’inventivité et de créativité, j’avais été bénie par la venue de ce duo dans ma vie et j’attendais depuis fébrilement leur deuxième album How Did We Get So Dark? qui promettait un retour en fanfare et en crasserie géniale. Vous vous doutez donc que la date du 16 juin était inscrite en lettres de feu dans mon calendrier et que l’album enclenché le jour J, je voyais la syncope s’approcher à grands pas de ma petite personne.
Mais une présentation est d’abord de mise : qui sont les deux larrons qui forment Royal Blood ? Au chant et à la basse on retrouve Mike Kerr, lequel est accompagné de Ben Thatcher à la batterie. Deux instruments, une voix, zéro guitare, zéro clavier, pas de flûte à bec non plus, c’est tout ce qu’il a fallu au groupe pour devenir une usine à tubes en un temps record. Les garçons ont formé Royal Blood en 2013 à Worthing en Angleterre et ont depuis grimpé les échelons du succès à coup de morceaux robustes qui sentent bon la bière, la transpiration et la sur-efficacité. Leur premier album éponyme sorti en 2014 fut un succès retentissant à la croisée du post-grunge, du garage et du blues. Et si tout cela ne suffisait pas, le groupe accompagnera Queens of the Stone Age sur leur nouvelle tournée et se permettra même d’avoir At The Drive In en guest durant leurs prochains concerts britanniques. Excusez du peu.
Alors que vaut ce nouvel album ? Royal Blood a-t-il continué sur sa lancée, s’est-il pris un mur, a-t-il su faire preuve de renouvellement ou au contraire patine-t-il dans la semoule ? On avait déjà de quoi se mettre de la matière sous la dent (enfin plutôt dans les orifices auditifs mais on ne va pas chipoter) puisque trois morceaux avaient déjà été dévoilés quelques semaines avant la sortie de l’album. Le public a ainsi pu découvrir un "Lights Out" que j’ai personnellement trouvé décevant car trop édulcoré, un "Hook, Line & Sinker" s’inscrivant dans la veine d’"Out of the Black", donc particulièrement jouissif, et "I Only Lie When I Love You" qui rappelait un Queens of the Stone Age (tiens, tiens) époque ...Like Clockwork. When Did We Get So Dark? dans les mains, on s’attend à ce qu’il soit bien évidemment réussi. Et ça ne rate pas.
Mais apportons quelques nuances à cette dernière déclaration voulez-vous. Car si ce deuxième album suit les traces de son grand frère, il comporte un poil de déception. Là où le premier album avait gagné mon coeur le pari d’être entièrement bon, on trouve dans How Did We Get So Dark? de petits moments mollassons. Ainsi, il m’a été impossible de me concentrer entièrement sur des morceaux comme "She’s Creeping" ou "Don’t Tell" où les instrus laissaient la place à la voix (trop ?) mélodieuse de Mike Kerr. Cette basse agressive des débuts se veut désormais plus en retrait et ce n’est malheureusement pas ce qu’on attend d’un groupe qui est censé déglinguer quiconque y jette une oreille curieuse. L’album est adulte et délaisse la dévotion presque adolescente des dernières années pour une œuvre plus étudiée et minutieuse.
En effet, How Did We Get So Dark? se veut plus délicat que le premier, peut-être plus réfléchi et du coup moins poussé, notamment sur des morceaux comme "Lights Out", "Where Are You Now?" et "Looks Like You Know". Une prod’ plus carrée, un son plus rond, une voix plus en avant, bref ça suinte un peu la mutation tout ça. Et puis il suffit d’entendre un "I Only Lie When I Love You" ou un énorme "Hook, Line & Sinker" pour se rappeler enfin de quoi Royal Blood est fait : de pure lave en fusion. On tape furieusement du pied jusqu’à ce que le voisin du dessous viennent nous engueuler, on se coince les vertèbres à trop vouloir headbanger et on explose d’extase sur le magnifique "Hole in Your Heart" qui est à mon sens LA bonne surprise de l’album. Un morceau maîtrisé, à la fois mélancolique, plaintif et torturé. De la beauté à ne plus savoir qu’en faire.
Ce nouvel album est une claque rapide (dix morceaux d’une durée moyenne de trois minutes, ça s’écoute à la pause déj) à se prendre avec joie sur la tronche. Elle ne laissera pas forcément de grosse marque écarlate sur votre visage, mais saura vous réveiller assez pour vous donner envie de secouer cette pauvre carcasse que vous trimballez. Moins bon que le premier dans son ensemble, il s’appréciera cependant tout aussi bien et deux ou trois morceaux sauront vous donner l’envie d’y retourner. Et si ce duo turbo-vénère trouve place dans votre cœur vous pourrez toujours prendre votre place pour leur concert au Zénith le 7 novembre prochain. Pour ma part c’est déjà fait, et je n’ai aucun regret.

