
Tangerine Dream
Atem
Produit par
1- Atem / 2- Fauni Gena / 3- Circulation Of Events / 4- Wahn


Le temps passe, reste le souffle vital, qui persiste tant que l’inspiration guide les musiciens dans leur progression esthétique. De Zeit à Atem, la temporalité est brève : après la sortie (et le relatif échec commercial) de leur troisième album, un successeur est rapidement réalisé par le seul trio – Froese, Baumann, Franke - sans invité, ni changement dans le personnel. Une stabilité et une apparente sobriété détonnantes dans la carrière de Tangerine Dream, qui avait habitué à plus de rebondissements et de grandiloquence instrumentale. Voilà pour le temps.
Pour ce qui est du souffle, c’est au mellotron qu’il faut s’en remettre car il est désormais complétement adopté par Froese et finit par surplomber Atem. L’instrument est capable d’être un orchestre à lui seul, bien que ses imitations analogiques soient toujours approximatives : c’est justement dans cet écart que se trouve son charme, si bien que ses sonorités évoquent immédiatement les années 1970, ou au moins celles du rock progressif au sens large. Il faut s’arrêter sur "Fauni-Gena", l’ouverture de la seconde face d’Atem, pour apprécier au mieux les élucubrations mellontroniques d’Edgar Froese, entre bruits d’oiseau et de batraciens dans une ambiance de canopée humide au petit matin, qui devient de plus en plus inquiétante, alors qu’un premier semblant de séquence s’étend en arrière-plan.
Le souffle, c’est surtout "Atem", une longue pièce de plus de vingt minutes, qui commence par évoquer directement son titre par des respirations venteuses, pour ensuite monter en puissance dans une marche inquiétante aux percussions militaro-tribales. La partie centrale se veut plus calme mais elle demeure toujours aussi angoissante - chaque son semble apparaître des ténèbres pour assombrir la symphonie électronique. Puis, le rythme réapparaît subrepticement, avant un dernier mouvement alourdi par des effets sonores réguliers et envoûtant, semblables à un moteur d’hélicoptère, qui accélèrent un peu la dynamique du titre.
Deux morceaux plus brefs concluent Atem, "Circulation of Events" avec ses modulations expérimentales et le plus original "Wahn", dont le jeu de questions-réponses en onomatopées aurait pu avoir été capté sur les ondes de la Radio Gnome lors d’un voyage vers la Planète Gong. Le résultat est tout de même plus proche des musiques tribales traditionnelles, les percussions aidant, et le deuxième temps très mélodique accroît encore l’intérêt de cet exercice.
Le chemin se dessine vers Phaedra et ses séquences hypnotiques, celui qui mène des années Ohr aux années Virgin, de l’Allemagne au Royaume-Uni. Pour ce faire, Tangerine Dream reçoit le soutien de John Peel qui diffuse Atem en boucle (ou en séquences) sur la BBC. Il offre à l’album le succès que Zeit n’avait pas obtenu et attise la curiosité de Richard Branson qui fera bientôt du groupe un de ses protégés, aux côtés de Mike Oldfield.
À écouter : "Atem", "Wahn"