
Dead Letter Circus
This Is The Warning
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1- Here We Divide / 2- One Step / 3- Big / 4- The Space On The Wall / 5- This Long Hour / 6- Cage / 7- Reaction / 8- The Drum / 9- The Design / 10- Next In Line / 11- Walk / 12- This Is The Warning


Dead Letter Circus, vous  connaissez ? A priori non, sauf si vous êtes un fanatique de rock  alternatif australien. Sachez donc que ce jeune combo de  Brisbane (ville qui a déjà vu émerger les redoutables The Butterfly  Effect, à suivre lors d’un prochain épisode) est actuellement en train  de créer une petite sensation au pays des kangourous. Rassurez-vous,  rien de comparable à AC/DC, Silverchair ou autres Airbourne, juste un  succès d’estime aussi fulgurant qu’inattendu car appuyé par des tournées  intensives, deux EP prometteurs et surtout un album proprement radical  dans son traitement sonore. Bienvenue dans le vingt-et-unième siècle...
La première impression  dégagée par les quatre guerilleros du bush a de quoi laisser perplexe  tant leur rock apparaît aussi dense qu’hermétique. Rien que l’artwork  mystico-futuriste de This Is The Warning et l’esthétisme absconse du  clip de “Big” nous font osciller entre répulsion réflexe et amusement  détaché. Pire : musicalement, on pense tour à tour à une certaine frange  de professionnels qui peinent à attirer les louanges dans les milieux  autorisés, U2 version années 80, 30 Seconds To Mars première période,  Linkin Park des origines. Malgré tout, on sent qu’il y a quelque chose  de différent et surtout de plus consistant dans tout ce chantier sonore.  Et puis, à force de trier parmi nos références discographiques, on  finit par trouver la clé qui nous ouvre la porte de Dead Letter Circus :  Cave In. Mais si, rappelez-vous ! Le groupe de Stephen Brodsky, qui  avait tourné le dos au metal alternatif pour s’orienter vers un rock  plus soft et progressif au début des années 2000 avec le remarquable  Antenna avant de splitter quelques temps plus tard. Hasard ou  coïncidence : c’est au moment où Cave In annonce sa reformation que ses  disciples émergent de l’autre côté du globe. Mais disciples de quoi  exactement ?
Avant  de vous lancer dans l’écoute de ce disque, un avertissement s’impose :  les Dead Letter Circus ne font pas de détails. Pour les quatre jeunes  australiens, exécuter du rock s’apparente à un engagement qui revient à  s’attaquer à un nid de guêpes en y envoyant la totalité des forces de  l’armée australienne, en y lâchant quatre ou cinq tapis de bombe à  fragmentation, en vidant une centaine de chargeurs de fusils  automatiques et en assaisonnant le tout au napalm pour être certain de  l’éradication des nuisibles. Et pour parvenir à un tel remplissage de  l’espace sonore, la formule retenue par ces acharnés tient en quelques  maximes auxquelles ils se plient en toutes circonstances : jouer de la  basse comme d’une mitraillette, pousser les échos de la guitare au  maximum et le volume des amplis à fond, massacrer un jeu de peaux de  batterie tous les jours à force de bestialité, combler les fréquences auditives délaissées par des rafales d’électro stroboscopiques, et donner de  la voix à pleine puissance jusqu’à en faire péter les vitres du lieu de  répétition. On vous renverra à quelques passages complètement barrés de  “Here We Divide” et du refrain atomique de “This Long Hour” pour  éprouver cette sensation de guerre totale, propre à déclencher une  transe extatique pouvant parfois confiner à l’épilepsie, avant de vous  faire proprement exécuter par les rafales meurtrières d’AK 47 de “Next In  Line”. Même lors des balades simples comme “The Drum” ou “The Design”  qui font un (court) temps retomber la pression, on en arrive toujours à  une flopée d’explosions de missiles pour parfaire le propos du groupe.  Comme quoi, il n’y a pas que le metal qui soit capable d’en mettre plein  les oreilles. Face à un tel traitement, inutile de vous faire un dessin  : soit vous encaissez sans broncher et vous tâchez d’aller voir un peu  plus avant de quoi il retourne, soit vous fuyez sans demander votre  reste. Dans une telle situation, difficile d’en vouloir aux lâches...
C’est une fois la  première approche stratégique accomplie avec succès que l’analogie avec  Cave In devient évidente, notamment au travers du jeu de guitare à la  fois sec et ampoulé de Rob Maric, sorte de croisement improbable entre  les sonorités amples de The Edge et le côté irascible et brutal de Joey  Santiago. Seule la voix sur-hystérique de Kim Benzie, bandée comme une  corde d’arc prête à se rompre, et le traitement hyper lyrique des  morceaux poussent les kangourous dans des territoires beaucoup plus  barrés que ceux de leurs maîtres à jouer. Mais il y a plus, car on se  rend rapidement compte que les airs de This Is The Warning sont beaucoup  plus complexes qu’il n’y paraît au premier abord. Loin de s’adonner à  la simple alternance couplet - refrain, les Dead Letter Circus  brouillent les pistes et enchaînent les motifs mélodiques sans se créer  de carcan, ici en modulant sur quelques accords, là en ôtant ou en  rajoutant quelques  mesures. C’est cette richesse sonore qui offre à  l’album une durée de vie plus longue que la moyenne des réalisations du  créneau et qui compense une longueur trop importante (à ce stade, un  morceau comme “Walk” s’imposait-il vraiment ?), surtout après avoir  essuyé un tel passage à tabac auditif. 
Un album extrémiste,  donc, qui vous enchantera ou vous ulcérera selon vos goûts musicaux,  mais qui mérite malgré tout une écoute approfondie pour en apprécier  toutes les nuances. This Is The Warning se révèle être un manifeste  baroque et excessif, d’une violence inouïe dans sa manière d’empiler les  couches sonores, et qui représente pourtant une base de travail brute  sur laquelle quelques oeuvres plus nuancées verront très certainement le  jour à l’avenir. En attendant, si vous voulez découvrir ce groupe, il  vous faudra passer par le rayonnage import de vos disquaires. Pas sûr,  en effet, que nos revendeurs hexagonaux soient prêts à miser quoi que ce  soit sur un opus aussi absolutiste... 





















