
dredg
The Pariah, the Parrot, the Delusion
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1- Pariah / 2- Drunk Slide / 3- Ireland / 4- Stamp of Origin: Pessimistic / 5- Light Switch / 6- Gathering Pebbles / 7- Information / 8- Stamp of Origin: Ocean Meets Bay / 9- Saviour / 10- R U O K? / 11- I Don't Know / 12- Mourning This Morning / 13- Stamp of Origin: Take a Look Around / 14- Long Days and Vague Clues / 15- Cartoon Showroom / 16- Quotes / 17- Down to the Cellar / 18- Stamp of Origin: Horizon


Ah, la baie de San Francisco ! Son Golden Gate, son soleil écrasant et  son thrash metal originel ! Aussi étonnant soit-il, c'est également dans  la baie de San Francisco, à Los Gatos pour être exact, que se trouve  basé un sacré bon groupe de rock étiqueté progressif, parcimonieux dans  ses réalisations (quatre albums studios en un peu moins de quinze ans),  quasiment inconnu en Europe mais rassemblant une petite communauté  d'admirateurs fervents chez l'Oncle Sam, les bien nommés dredg.  Avec un "d" minuscule : ils y tiennent, le nom de leur groupe ne veut  rien dire mais ils y tiennent quand-même. Si ça peut leur faire  plaisir...
Quand on pense progressif, on pense forcément Pink Floyd, Marillion ou King Crimson quand on est un vieux schnoque, ou bien Tool, Dream Theater ou  Opeth quand on est un chevelu énervé. Rien de tout cela avec dredg qui  possède un style très personnel, forgé patiemment au fil des années et  au cours de nombreuses tournées sur le sol américain, et qui rappelle  par certains côtés les excellents Incubus en  un poil plus soft. Ce quatrième album, particulièrement abouti,  délaisse même les complexités et les longueurs du rock progressif  aperçues dans les réalisations précédentes pour se recentrer sur des  lignes mélodiques simples, fourrées dans un concept-album narrant un  voyage imaginaire autour du monde, centré sur des thèmes comme  l'agnosticisme (l'album est inspiré par le célèbre Imagine There Is No Heaven: A Letter to the Six Billionth Citizen  de Salman Rushdie), et agrémenté d'ambiances sonores évoquant  romantisme ou étrangeté d'une égale manière. Pour ceux qui sont abonnés  au prog anglais, l'immersion dans The Pariah, the Parrot, the Delusion  possède un petit côté rafraîchissant et original, que viennent relever  des arrangements particulièrement léchés conférant au disque un côté  classe et raffiné.
Ce qui frappe le plus à l'écoute de ce groupe,  c'est la qualité du batteur. Certes, les cogneurs qui officient dans les  groupe de prog sont souvent excellents, ne serait-ce que pour délivrer  les frappes syncopées et asymétriques fréquentes dans les compos du  milieu, mais Dino Campanella a cette particularité de posséder un jeu à  la fois véloce sans être surchargé, très puissant, et surtout d'une  variété peu commune, jouant sur des cassures rythmiques parfois  surprenantes et sur des sonorités vraiment différentes d'un morceau à  l'autre. C'en est à un tel point que l'on peut même envisager une écoute  de cet album en se focalisant exclusivement sur la batterie, un vrai  régal pour les oreilles. Les autres instrumentistes ne sont pas en reste  et développent des trésors d'imagination pour transporter chaque titre  dans un univers qui lui est propre, jouant parfois sur de fines couches  synthétiques grésillantes ("Saviour"), mettant en valeur ici un piano  dépouillé, là quelques arrangements électriques lourds qu'on jurerait  issu du désert Mexicain, allant même parfois titiller la folk ("Cartoon  Showroom") mais sans se départir d'une cool attitude communicative. 
L'album  joue donc sur une succession d'ambiances diverses et alterne morceaux  classiques et courts passages instrumentaux qui favorisent l'évasion,  ces intermèdes permettant souvent de laisser les guitares décharger leur  furie de façon impromptue ("Drunk Slide", "Long Days And Vague Clues").  Au delà de ce canevas parfaitement tissé se retrouvent des mélodies  emballées avec beaucoup d'élégance et déclamées impérieusement par le  chant clair de Gavin Hayes. Parmi les singles avérés ou potentiels, on notera  bien sûr le majestueux "Pariah" et son soutien instrumental princier,  "Information" et sa batterie ultra-catchy, "Gathering Pebbles" et ses  boucles vocales hypnotiques, mais surtout l'imparable "I Don't Know"  avec sa mélodie qui tue et sa petite rythmique groovy à souhait. A  propos de groove, dredg s'est rendu maître en la matière de façon  incontestable, comme en témoigne le funk curieusement teinté de  pessimisme de "Mourning This Morning". Ailleurs, on se retrouve surpris  par des couplets enlevés laissant place à des refrains tout en retenue  ("Light Switch", "Quotes"), preuve d'une grande finesse de composition  de la part des californiens. Et si certains morceaux s'égrènent l'air de  rien, ils n'ont pourtant pas leur pareil pour nous transporter entre  nostalgie et contemplation ("Ireland")
Pour l'anecdote, on signalera aussi que les membre de dredg connaissent bien ceux de Deftones, groupe pour lequel ils ont fréquemment ouvert sur le sol américain. D'ailleurs, The Pariah, the Parrot, the Delusion  a été dédié à Chi Cheng, la bassiste de Sacramento victime d'un lourd  accident de la route quelques semaines à peine avant la sortie de  l'album. Tout ça pour vous dire que ce disque, même s'il commence à  dater un peu, mérite un large détour pour tous ceux qui aiment l'art  rock américain classieux et nuancé. Et rendez-vous déjà l'année  prochaine pour découvrir son successeur, puisqu'il semblerait que les  californiens ont décidé d'accélérer la cadence. On ne va pas s'en  plaindre.

























