↓ MENU
Accueil
Première écoute
Albums
Concerts
Cinéma
DVD
Livres
Dossiers
Interviews
Festivals
Actualités
Médias
Agenda concerts
Sorties d'albums
The Wall
Sélection
Photos
Webcasts
Chroniques § Dossiers § Infos § Bonus
X

Newsletter Albumrock


Restez informé des dernières publications, inscrivez-vous à notre newsletter bimensuelle.
Critique d'album

Wootz


Welcome None


(03/05/2024 - - - Genre : Hard / Métal)
Produit par

Note de 4/5
Vous aussi, notez cet album ! (3 votes)
Consultez le barème de la colonne de droite et donnez votre note à cet album
Note de 3.0/5 pour cet album
"L’acier est résistant car il connait le marteau. Johnny Cash "
Daniel, le 07/08/2024
( mots)

Prélude

C’est toujours une merveilleuse surprise que d’apprendre au XXIème siècle que des gaillards prennent encore la peine d’acquérir (ou de chiper) des instruments de musique pour se réfugier dans une cave.

Objectif : faire trembler les fondations de l’immeuble en jouant plein pot la musique saturée du Diable.

D’expérience, je sais que, tout excitant qu’il soit, le processus réclame beaucoup de sueur, de patience, de pédagogie, de modestie, d’amour universel pour son prochain et de jus de houblon.

Pousser le bouchon plus loin en allant écumer les scènes locales, quand il en existe (1), est une étape difficile. Parfois désespérante. A ce stade, si les musiciens ne se sont pas encore électrocutés, entretués ou fâchés à jamais, l’ambition d’enregistrer "leur" musique est sincèrement de nature à changer des existences.

Assez curieusement, c’est souvent la nostalgie (cette fiancée des bons souvenirs que l’on éclaire à la bougie) qui est le moteur de la démarche. Il existe une force puissante et mystérieuse (2) qui contraint certains humains à "ressusciter" un passé qui leur est extrêmement cher. Pour l’un, ce sera le punk, pour les autres la NWOBHM, le rock progressif, les années ’90, le British Boom ou le rock des pionniers. Ça ne se commande pas.

L’aventure s’apparente très souvent à un cliché digne des délires de Frank Margerin. Mais sans logique apparente, certains réalisent leurs rêves. Il faut par conséquent louer Wootz qui, après s’être formé au printemps 2021, a déjà franchi les premières étapes du grand défi rock avec une jolie ferveur et un enthousiasme communicatif.  

Dans le désert (de Californie), tu ne te souviens plus de ton nom

Si l’art ancestral de fabriquer l’acier Wootz s’est perdu depuis plusieurs siècles faute de minerai approprié, il n’est pas illogique que le patronyme resurgisse du passé dans la région de Montbéliard où le fer et l’acier sont restés omniprésents.

Quitte à forger un rock métallique, autant installer l’enclume au cœur d’un pays où les salles de concert sont nombreuses et ouvertes aux décibels sous-accordés.

C’est que l’esprit puissant de Joshua Josh Homme plane sur Welcome None. Tant qu’à faire, autant recevoir une bénédiction du pape en personne plutôt que d’un autoproclamé diacre de village.

Il est évidemment étrange d’importer un style né du désert californien (3) dans un endroit du monde où les hivers sont plutôt rudes. Mais, comme tous les forgerons le savent, il n’y a de bon Damas que celui qui connait la flamme avant d’être brutalement trempé dans l’eau froide.

Question de contraste.

Ne rien dire et laisser fer

Né en 2021, Wootz (le trio de Montbéliard, pas le métal indien) réunit Fat Jeff (chant, guitare), un musicien connu sur la scène locale pour, entre autres, ses ébouriffantes performances blues en solo, Greg (batterie) et Mick (basse), deux membres du défunt trio "mötörheadien" Fre3 Bastards,


A peine porté sur les fonts baptismaux de l’église Saint-Maimboeuf, le groupe passe rapidement la surmultipliée en publiant un EP quatre titres autoproduit.

Après cette mise en appétit, le groupe franchit un nouveau cap en publiant son premier album, Welcome None.

Flirtant avec le second degré (du moins, je l’espère), l’artwork (très classieux et vraiment réussi) de l’opus impose une atmosphère en léger décalage avec l’essence même du disque.

Le propos est, comme il se doit, assez systématiquement sombre et oppressant ; aucun espoir n’est permis dans ce monde et probablement dans aucun autre. Les mots "mort", "mourir" et "tuer" circulent en boucle comme des mantras. C’est à croire que tout est hostile à l’humain, que ce soit la technologie, les autres êtres ou lui-même. Reste à savoir qui pourrait bien être aux commandes de ce grand complot malaisant et perpétuel.

Sacrifiant à un style dépourvu de concession, Welcome None ne parviendra pas à convaincre ceux que rebute le stoner, son sous-accordage, ses breaks, ses cordes vocales passées au papier émeri (la même marque que celle qu’affectionnait Kurt Cobain), ses batteries Ludwig travaillées à la barre à mine, ses préoccupations mortifères et ses ambiances pachydermiques.

En revanche, ceux qui apprécient le genre et son héritage fait de sable, de minerai ferrugineux et de boue y trouveront plus que probablement leur compte.

Welcome None débute avec "Breathless" qui figure parmi les plus belles réussites de l’album. Avec ses allures de classique instantané, le titre place d’emblée la barre très haut. C’est à la fois un direct, un uppercut et un crochet qui laisse l’auditeur KO debout. Impossible à esquiver.

"At Your Side" ressuscite avec emphase les antiques tourments d’un Black Sabbath (4) en pleine ascension tandis que la plage titulaire évoque le même groupe à une époque postérieure à ses classiques (5).

"Focus", la plage conclusive donne envie d’y revenir, ce qui reste la fonction naturelle d’une coda.

Only way to feel the noise is when it's good and loud

Très subjectivement (honte sur moi), je ne suis pas totalement convaincu par les textes dont la structure malmène parfois la langue anglaise, au même titre que l’accent chanté "gratte" parfois les oreilles aux entournures. Les petits rockers savent ce que je pense à ce propos et, pour cette fois au moins, je prêche dans un vrai désert de Californie, ce qui me fait des vacances inédites.

Il reste à savoir si Wootz va continuer à creuser cet unique sillon musical (au risque pour le groupe de se retrouver un jour ensablé) ou si les forgerons de Montbéliard vont vouloir s’affranchir de ce style monolithique pour enrichir leur musique en piochant parmi d’autres influences musclées.

Il faut toujours faire confiance aux artistes. Après tout, ce sont eux qui sont seuls maîtres de leur destinée (6) !

En attendant, tous les petits rockers sont invités à prendre place dans la Time Machine pour mettre le cap sur les nineties. Quelque part du côté de Palm Desert, pile-poil entre Palm Springs et la Franche-Comté. Pas si loin de la zone où George Adamski a rencontré des Vénusiens.

C’est dire si tout ce boucan a du sens…


(1) Mon petit groupe a joué un jour sur une bétaillère très sommairement aménagée. Nous avons dû veiller à répartir équitablement le poids du matériel et des musiciens de chaque côté de l’essieu pour éviter qu’un faux mouvement ne précipite tout notre barda sur les pavés de la place du village. Un stress abominable. Je n’avais jamais compris pourquoi ma prof de chant me disait qu’il faut être relâché pour bien vocaliser. Ce jour-là, j’ai effectivement appris qu’il est difficile de pousser une note juste avec les fesses serrées.

(2) Jeanne d’Arc aurait parlé d’une "voix" mais on sait comment elle a fini. Ça a été moche.

(3) Le stoner est tellement lié à une région spécifique du monde qu’on pouvait se demander s’il était en mesure de s’exporter sans perdre toutes ses plumes.

(4) Ou, pour les complétistes, d’un Blue Cheer dans son incarnation la plus sauvage…

(5) "Dehumanizer" avec Ronnie James Dio, par exemple.

(6) La réflexion n’engage que moi : si l’autoproduction a ses vertus, je pense que, pour la suite, Wootz aurait à gagner en faisant appel aux services d’un producteur extérieur qui pourrait "arbitrer" ou orienter certains choix artistiques sans que le groupe n’y perde son identité. Mais de quoi je me mêle ?

Merci à ces dévoués relecteurs et relectrices sans qui mes textes seraient une fois truffés de belgicismes.


Merci à Wootz pour son aimable collaboration.


Cette chronique est dédiée à la mémoire de Lemmy (49% Son Of A Bitch / 51% Mötherfücker) Kilmister.


 

Commentaires
Que nenni ma foi , le 10/08/2024 à 20:46
Super groupe franc comtois que j'ai vu deux fois sur scène. Allez les voir sur scène ça arrache.