Ghost Brigade

Classé sous X. Bon courage pour rattacher la musique de Ghost Brigade à un registre unique. Death Melodique, Postcore, Doom… cette fresque sonore qui relève bien d'une addition de composants stylistiques pour les Finlandais. Plutôt qu'une grossière étiquette posée sur le front, s'il fallait ranger le groupe dans une catégorie, faisons le choix de partir des sentiments que l'on traverse à l'écoute de ce Until Fear No Longer Defines Us. Un album empreint d'une lourdeur mélancolique qui laisse se déverser le mal-être et de sombres névroses dans un sens mélodique évident. Le sextuor éteint toutes les lumières pour leurs préférer un ciel obscur, aux ambiances brumeuses, qui n'est pas sans rappeler celui de leur voisin originaire de Suède : Katatonia. Mais là où le groupe mené par Jonas Renkse s'appuie sur des opus à la linéarité prononcée, Ghost Brigade fait le choix de la variation. Loin du simple effet de surprise déposé innocemment au cœur de l'album, l'alternance est le mantra des Finlandais. Cette dernière se caractérise par les approches vocales du chanteur Manne Ikonen qui oscille entre growls caverneux et chant clair aux échos d'un Rock américain qui, pour grossir le trait, se situerait quelques parts entre Dave Grohl et Chris Cornell. 

Une ambivalence que Ghost Brigade va afficher dès l'ouverture de Until Fear No Longer Defines Us, quitte à perdre en cohérence sur le tracklisting. Chargé d'ouvrir l'album, les arpèges acoustiques médiévales de "In The Woods", qui accompagnent la voix cristalline de Ikonen, auraient eu leur place bien plus loin dans l'album. Mais le groupe originaire de Jyväskylä fait le choix d'exposer d'emblée les extrêmes de son éventail musical. Ainsi la douceur mielleuse de cette ouverture va être violemment écrasée par le riff torturé et les hurlements des premières secondes de "Clawmaster". Dès lors, nous aurons de cesse d'être baladé d'une face à l'autre dans cette pièce musicale qu'est Until Fear No Longer Defines Us. Et, avec ces allers-retours incessants, se pose la question de la pertinence de Ghost Brigade dans le jeu de ses émanations.La réponse tiendra à votre affinité envers ces différents courants.
Les amateurs de Metal trouveront aisément leur compte dans la prolifération de morceaux bâtis sous stéroïdes où les riffs de guitare font systématiquement mouche ("Traces Of Liberty", "Breakwater", "Torn"). Une efficacité "guitaristique" rare qui s'apprécie dans sa lourdeur crasse. Ne vous attendez pas à des soli infinis à la démonstration technique exacerbée. Les Finlandais s'appuient sur l'efficacité immédiate de leurs lignes de guitares et matraquent ces dernières de manières toutes aussi déraisonnables que jouissives. Cette fureur dépouillée qui ne saurait dominer son sujet tant Until Fear No Longer Defines Us tranche dans le vif. Le disque porte ce sentiment, un brin regrettable, d'une recherche d'équilibre afin de contenter l'auditeur. Un titre comme "Grain" drague maladroitement la frontière entre rock et pop dans une balade cotonneuse qui ne s'imposait pas. Pour l'approche rock plus traditionnel, l'écorchée vive "Chamber" convainc bien plus au gré de son agrippante mélancolie. Reste les pièces qui concilient les aspirations sonores de Ghost Brigade où l'association chant clair/growl, mélodie épurée/riff pachydermique se lient à l'intérieur d'un même titre. Une formule qui tire tout son agrément sur "Divine Act of Lunacy". Cette ritournelle, aux apparences de montagne-russe, se décrypte assez facilement et donne lieu à des titres téléphonés comme le conclusif " Soulcarvers". 

Until Fear No Longer Defines Us, est un album miroir aux reflets asymétriques.
Dans une atmosphère noire, aussi prenante que superbement construite, les Finlandais s'efforce d’éviter l'écueil de la redondance. Le résultat donne un disque indiscutablement varié qui pour autant souffre de quelques longueurs, la faute à des schémas de compositions écumées et des morceaux laiteux à la radicalité surjouée. Emmené par un chanteur hégémonique, Ghost Brigade n'est jamais meilleur que lorsque qu'il évolue dans son metal orageux où la science de leurs riffs de guitare fait des merveilles qu'il convient de découvrir absolument. 

A écouter :  "Traces Of Liberty", "Breakwater", "Divine Act of Lunacy"